jeudi 27 juin 2013

Si tu t’imagines petite si tu t’imagines




La demoiselle n’en sait rien et pourtant dans sa vie ce jour est le plus grand
l’Everest même de toute son existence
Elle a disons dix huit ans
faut bien deviner je ne lui ai jamais vu la figure
Et non
je ne sais pas non plus ce qu’il va lui arriver après ce jour
Sauf ceci
jamais plus les choses pour elle n’iront aussi bien
Elle est en train de marcher devant moi
à côté d’elle un jeune homme
il a la clarté du petit ami
Elle porte un pantalon bien bleu très léger
A son corps ils collent aussi étroitement que le ciel est ajusté à la terre
Ils ne sont pas là par hasard
la demoiselle a un corps magnifique et
sanctuaire du vingt et unième siècle qui baigne dans le plaisir des adorations
elle déambule
Du plus petit mouvement
de la moindre ombrette 
qu’à marcher ainsi elle exprime
consciente
parfaitement
La violence du sentiment religieux que l’on a de son corps ?
Elle n’a qu’à regarder les prières dans les yeux des hommes
pour la connaître
La voici qui tend la main en arrière
et sur le cul se donne une mignonne caresse
Et en est satisfaite
Elle sait bien ce qui est bon
En plus
tout ça
c’est à elle !
Adoncques amoureusement elle se le flatte
Et en est très heureuse
Peut-être verra-t-elle les cent ans
si oui
jamais plus la vie ne lui sera aussi belle

Christian Astor
mercredi 26 juin 2013

mercredi 5 juin 2013


une silhouette se dessina sur la terrasse
noire
dans l’encadrement de la porte croisée
comme l’ombre d’un inconnu
derrière
en plein ciel
deux étoiles semblaient l’avoir assisté jusque là
lueurs resplendissantes sur frange amarante
au loin
dans le quadrant où sont inscrits ensemble savoir et beauté
où survit la fraternité
la mère le vit
mais ne put examiner son visage contre le rectangle de lumière
j’entrai
la mère défigurée par la pâleur
ses lèvres exsangues tremblant convulsivement 
buvant des larmes désespérées
était demeurée les mains jointes sur le ventre
sans oser baisser les yeux sur la mémoire en lambeaux de son mari
elle regardait devant elle
droit
face à l’incroyable
en refusant l’image
comme si vivre même eût été un affront
pour qui ne peut se racheter de son silence

Christian Astor

extrait de « Errance colorée »